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Prospective de l’exploration spatiale

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© Olivier Boisard - 2006-2013

 
  1. La navette spatiale fait place à des lanceurs plus simples et plus économiques, puis à l’avion spatial de troisième génération.

  2. La conquête de Mars coordonne les grands projets spatiaux, y compris le retour de l’homme sur la Lune.

  3. Autour de la Terre se concentrent les fonctions utilitaires de communication, d’observation, et de navigation.

  4. Les satellites scientifiques qui ne sont pas dédiés à l’observation de la Terre s’éloignent vers les points de Lagrange, ou vers la Lune.

  5. Les micro et nano satellites se multiplient.

  6. Des nouvelles puissances spatiales apparaissent, et des acteurs privés se lancent dans le tourisme spatial.

  7. La recherche & développement liée à l’espace se développe dans les domaines de l’énergie et de l’environnement.

Temps 1

Mars ... Image O.Boisard

EXPLORATION

ET

RENTABILITE

Le temps de l’exploration débute le 4 octobre 1957 avec la mise en orbite de Spoutnik 1. L’exploit est historique, mais une inconnue subsiste : l’homme pourra-il survivre dans l’espace ? Il faut attendre le vol de Gagarine en 1961, puis les nombreuses missions qui suivront, pour lever définitivement cette incertitude. L’aventure spatiale est lancée …Comme tout processus, elle connaît des cycles d’avancées puis de stagnation, des fausses pistes, des réajustements, et de spectaculaires réussites.

Après la conquête de la Lune, plusieurs décennies s’écoulent durant lesquelles toutes les missions habitées sont concentrées sur des orbites basses, à quelques centaines de kilomètres seulement de la Terre. Durant cette période, la « technologie de l’ apesanteur » se développe, on teste la capacité de l’homme à effectuer de très longs séjours dans l’espace, des stations modulaires sont construites.

Un des éléments clefs de l’époque est la navette spatiale, extraordinaire avion-fusée conçu, à l’origine, pour minimiser le coût du « ticket » d’accès à l’espace lors de missions multiples. Elle effectue près de cent vingt vols en vingt-cinq ans. Ce chiffre est toutefois très inférieur à celui initialement escompté et, surtout, on ne peut à oublier la dramatique disparition de deux des six engins de sa flotte.

Space Shuttle - NASA

Les temps sont à l’économie, dans tous les sens du terme. Paradoxalement, l’opinion publique réclame tantôt des projets moins coûteux, tantôt des programmes plus ambitieux que le «simple» fait de « tourner en rond » sur des orbites basses.

L’industrie spatiale, pourtant, est en plein essor : poussée par des applications militaires, elle est aussi, dans le domaine des communications, un des moteurs de la société de l’information qui émerge. L’espace est un miroir tourné vers la Terre : des «balises» spatiales offrent un moyen de naviguer avec une extrême précision grâce au GPS, des satellites d’observation permettent d’observer la Terre et son environnement. Avec des budgets bien moindres, des programmes scientifiques se poursuivent : les télescopes spatiaux scrutent le ciel profond, et des sondes automatiques sont envoyées dans le système solaire pour rencontrer des comètes, étudier le Soleil, et se poser sur Mars ou sur Titan. Toutes ces images nouvelles de la Terre et d’astres lointains contribuent à faire évoluer les consciences, de façon peut-être moins spectaculaire qu’en son temps le programme Apollo, mais avec la même profondeur.

Mars Pathfinder - NASA

CEV - NASA

Au début des années 2000, une nouvelle destination de rêve s’impose : la planète Mars. C’est avant tout un objectif destiné à coordonner, et rendre plus lisible que par le passé, l’ensemble des programmes spatiaux.

Le débat porte sur la stratégie à adopter : faut-il une mission directe vers la planète rouge, ou revenir préalablement sur la Lune pour en faire la première étape du voyage ?

Dans un premier temps apparaît une nouvelle génération de lanceurs. La navette spatiale est abandonnée au profit de systèmes plus simples – et plus fiables - distinguant le fret des capsules habitées. Le public s’étonne de ce surprenant retour, après quelques décennies, de capsules spatiales comparables, dans leur forme et leur principe, à celles de l’époque Apollo. Celles-ci n’avaient pourtant jamais été abandonnées : ni par la Russie avec ses Soyouz - qui ont prouvé leur efficacité - ni la Chine qui depuis 2003 envoie de la même façon ses «taïkonautes » dans l’espace.

Au terme d’un long et ambitieux programme de 15 ans, un premier vaisseau s’élance vers Mars en 2030. Il aura fallu convaincre de nombreux interlocuteurs – et de nombreux pays partenaires – pour construire l’aventure. Argument décisif, il est démontré que son budget global correspond à des dépenses annuelles à peine supérieures à celles consacrées aux vols habités durant les années 1990.

La mission doit être économique, offrir au futur équipage de parfaites conditions de sécurité – donc de redondance des équipements –, tout en respectant les cycles de rotations de la Terre et de Mars autour du Soleil …

La solution retenue dure un peu plus de trois ans. A la vérité, le premier vaisseau envoyé vers la planète rouge n’emporte pas encore de passagers . Cet engin automatique emprunte une trajectoire ne réclamant qu’un minimum d’énergie, pour un voyage de 8 à 9 mois.

Arrivé à destination, il se sépare en deux modules : l’un d’entre eux reste en orbite autour de Mars, ce sera le futur véhicule de retour des astronautes. Le second rejoint le sol, et commence un travail de synthèse chimique - de l’atmosphère ambiante et des ressources en eau accessibles en profondeur - afin de distiller des quantités suffisantes d’oxygène et l’hydrogène liquides. Ce carburant sera utilisé par l’équipage lors de son retour en orbite martienne.

Film : Mission To Mars

A la même date, le vaisseau habité quitte véritablement l’orbite terrestre. Sa trajectoire, un peu plus coûteuse en énergie, permet de réduire à 6 mois la durée du vol. Pour qu’une nouvelle fenêtre de tir favorable apparaisse dans le ciel, l’équipage doit rester 18 mois sur Mars. Il revient sur Terre 6 mois plus tard, au terme d’une mission qui aura duré au total deux ans et demi. Un des intérêts de ce programme est d’envoyer, en même temps que les astronautes, un vaisseau automatique identique au premier, en prévision d’un nouveau cycle de vols, et donc de nouvelles missions habitées. C’est aussi, par le dédoublement des systèmes, une sécurité supplémentaire pour les douze astronautes de l’équipage, en cas de défaillance d’un de leurs équipements.

La Lune n’est pas oubliée. Face à l’éloignement de Mars, la Terre semble se rapprocher de son satellite naturel. L’homme revient sur les traces qu’il avait laissées quelques dizaines d’années plus tôt. Mais la Lune est aussi le point de rencontre symbolique de deux des plus belles aventures technologiques et humaines du XXième siècle : sa conquête en 1969, et le développement d’Internet à partir de 1992.

Un rover sur la Lune ?

Des petits rovers avaient déjà fait rêver en capturant des paysages de Mars. Leur distance était telle cependant qu’il serait à jamais impossible de les piloter « en direct ». Ce n’est plus le cas sur la Lune, et chacun s’exerce fébrilement sur des simulateurs reproduisant le décalage d’un peu plus d’une seconde nécessaire pour qu’une commande, transmise à la vitesse de la lumière, atteigne le robot.

La Lune est redécouverte grâce à Internet. L’exploration, hors de la Terre, n’est plus réservée à une poignée de spécialistes, mais chacun peut y apporter son habileté, sa curiosité, et son talent, pour photographier la Terre presque immobile dans le ciel, s’aventurer dans de profonds cratères, ou explorer des failles mystérieuses …

Coucher de Soleil ...

NASA

La robotique spatiale se développe ailleurs que sur la Lune. Les deux mots-clefs sont « micro » et « nano » : la miniaturisation croissante de l’électronique, associée aux progrès de l’intelligence artificielle, conduisent à de nouvelles générations de sondes et de véhicules automatiques. Il est rappelé que le robot est à la fois le meilleur allié et le pire rival de l’homme dans l’espace. Pourquoi en effet confier à l’homme des tâches qu’une machine peut, sans risque, effectuer elle-même ? Comme le souligne un ancien spationaute, la présence de l’homme n’est nécessaire que lorsqu’il apporte ce qui lui est propre : sa perception du monde, et sa conscience…

Des sondes automatiques sillonnent le système solaire, et pour la première fois Pluton est survolée. Bientôt des robots d’observation sont mis en orbite autour de toutes les planètes majeures, avec un intérêt tout particulier – outre Mars – pour Jupiter, Saturne, et leurs satellites. On découvre qu’une comète surgit de la ceinture de Kuiper doit, dans quelques années, inéluctablement percuter Uranus : une mission est rapidement programmée pour étudier de près le phénomène. Excepté lorsqu’ils sont tournés vers la Terre, les équipements scientifiques s’éloignent peu à peu des orbites terrestres « classiques », déjà presque saturées. On pense un temps positionner le nouveau téléscope spatial sur un point de Lagrange entre la Terre et la Lune. L’idée est vite abandonnée, car ces points ont les défauts de leurs qualités : trop stables, ils concentrent des micro-poussières qui pourraient nuire aux observations. On préférera le satelliser autour de la Lune, en attendant une prochaine génération d’équipements construits, cette fois-ci, au fond d’un cratère, près du pôle, éternellement protégés du Soleil.

comete Yakutake

L’industrie spatiale est dynamisée par l’apparition de nouveaux acteurs : aux cotés des USA, de l’Europe, de la Russie et du Japon, la Chine s’impose comme une puissance à part entière. L’Inde, ainsi que de nombreux pays dits émergeants, développent également leur activité en direction de l’espace. Pour des raisons stratégiques, chacun souhaite se doter de ses propres systèmes de navigation, de communication, et d’observation. Dans le domaine scientifique, et sur les projets dont l’ampleur des budgets dépasse la capacité d’un état, les coopérations se développent au gré des conjonctures politiques.

Luna Cup - U3P

Des fondations, et des associations à but non-lucratif, bénéficient de la baisse des coûts spatiaux pour réaliser des projets originaux : très tôt, la course Terre-Lune de voiliers solaires est enfin organisée. A l’occasion d’un lancement commercial, une petite place est proposée gratuitement à trois capsules de quelques dizaines de kilos, renfermant des engins qui, une fois dépliés, formeront des voiles de trente mètres de coté capables de se mouvoir dans l’espace grâce à la pression photonique. Pendant plusieurs mois, l’événement est suivi à l’œil nu par tous les habitants de la Terre. Un trophée est remporté par le premier navire capable de photographier la face cachée de la Lune. Le succès rencontré par cette compétition incite ses organisateurs à la reconduire tous les quatre ans, à l’occasion des jeux Olympiques d’été.

Des acteurs privés s’intéressent au tourisme spatial. Certes, leurs moyens ne leur permettent pas encore de développer en toute indépendance des lanceurs orbitaux. L’option choisie est celle de l’avion fusée qui, dans d’excellentes conditions de confort et de sécurité, propose à un public privilégié d’effectuer, durant quelques minutes ou quelques heures, un vol suborbital suffisant pour contempler les courbes de la Terre. Cette industrie nouvelle repose sur de solides études marketing démontrant l’existence d’un réel marché, au potentiel de développement prometteur.

L’aventure spatiale se poursuit aussi sur Terre, dans les laboratoires de recherche, où deux priorités sont étroitement liées à l’espace. La première concerne l’énergie : si les ressources fossiles apparaissent suffisantes pour affronter la demande pendant encore plusieurs décennies – durée au demeurant très courte – leur coût de production augmente de façon continue et inéluctable. La maîtrise de l’hydrogène, également stratégique dans l’espace, est un enjeu majeur. La technologie des piles à combustibles notamment, elle-même issue des programmes de recherche & développement du programme Apollo, intéresse tout particulièrement l’industrie automobile. L’énergie solaire, dans le même temps, se tourne vers le ciel. On étudie la possibilité de construire en orbite géostationnaire des stations géantes, hyperstructures de kilomètres de long qui capturent l’énergie du Soleil pour la renvoyer sur Terre par des faisceaux de micro-ondes.

La seconde priorité répond à la grande préoccupation devenue incontournable en ce début du XXIième siècle : la protection de l’environnement terrestre, et l’étude de ses évolutions climatiques. Des constellations de satellites sont dédiées à l’observation de la Terre, des océans, de l’atmosphère. La moisson d’informations rapportées de l’espace a un but : faire évoluer les comportements, les mentalités, les politiques, à la surface d’une petite planète dont on ne cesse de découvrir la beauté, et la fragilité.

Ciel vu de la Terre ...

Une navette spatiale de troisième génération est mise en service. Cet avion spatial est exclusivement dédié au transport de passagers. Comme tous les lanceurs, il utilise de l’hydrogène et de l’oxygène liquides, dont la combustion ne produit dans l’atmosphère qu’une vapeur d’eau inoffensive pour l’environnement. C’est une gigantesque aile volante, d’une taille supérieure à celle d’un avion de ligne, de laquelle se détache à très haute altitude un petit planeur capable d’atteindre des orbites basses, puis de revenir seul se poser sur la piste de n’importe quel aéroport. La Terre dispose enfin d’un moyen économique et durable pour rejoindre l’espace.

JALONS

TEMPS 1 : EXPLORATION ET RENTABILITE

Avec un budget très faible comparé au « chantier » martien, des petits rovers, pilotables depuis la Terre, sont déposés sur la surface lunaire. Les plus sophistiqués sont réservés aux scientifiques, et destinés à sonder le sol, à la recherche de minerais rares ou, mieux, de glace issue de la collision avec des comètes. Mais d’autres, plus simples, ne sont en réalité que de simples caméras : on enregistre sur Terre d’impressionnantes listes d’internautes – passionnés d’espace, photographes, artistes, écoliers… - en attente des quelques heures durant lesquelles ils pourront en prendre les commandes, depuis leur ordinateur en réseau, et se transformer en astronautes virtuels.